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ENTRE SÉVILLE ET DAKAR avec Daniel Renzi

Focus | 6 juillet 2020 | Angela Mancipe

En ces temps de déconfinement, l’AMR a accueilli les ADEM et la RTS pour l’enregistrement de la deuxième édition des Jardins des ADEMEthnosphères magazine a discuté avec Daniel Renzi, l'un des concepteurs du projet Entre Séville et Dakar. Il nous parle de son projet musical, mais aussi de ses activités en tant que guitariste et enseignant au sein des ADEM. 

Propos recueillis par Angela Mancipe 

 

Entre Séville et Dakar lors de l’enregistrement des jardins des ADEM le 19 juin 2020.
(De gauche à droite, Sankoum Cissokho – kora, Marta Dias – percussion et Daniel Renzi – guitare).
Photographie : Vincent Zanetti

 

 

ENTRE SÉVILLE ET DAKAR

 

Ethnomag: Le nom de votre projet, Entre Séville et Dakar évoque le mouvement, de l’idée voyage. Comment ce projet artistique est-il né ?

Il est né principalement de l’envie de Maud Brulhart, danseuse, elle aussi professeure aux ADEM, d’interagir avec un autre style musical que le sien : le flamenco. Elle est attirée par les musiques et les danses africaines, c’est pourquoi nous avons pensé aller dans cette direction. Très vite, nous nous sommes rendus compte que les ADEM constituaient le lieu idéal pour mener à bien le projet. Nous avons demandé conseil à Laurent Aubert, à l’époque encore directeur des ADEM, qui nous a suggéré de nous approcher de Samir Mokhrani, pour le oud, et de Sankoum Cissokho, pour la kora. C’est ainsi qu’une collaboration s’est mise en place avec eux. Mais aussi avec d’autres musiciens, venus du monde du flamenco habitant en France, notamment Paloma Pradal, au chant, Juan Manuel Cortés à la percussion et Naomi Guerrero à la danse.  Notre premier concert a été très enthousiasmant. Il est l’un des meilleurs moments d’échange que j’ai passé avec le public.

L’année passée, Sankoum Cissokho, Maud Brulhart et moi avons repris le projet, en compagnie de Marta Dias à la percussion et de Yolanda Almodovar, au chant, elle aussi professeure des ADEM.

 

Ethnomag : Comme nous l’a rappelé Fabrice Contri, directeur des ADEM, le projet artistique Entre Séville et Dakar réunit deux traditions a priori fort éloignées l’une de l’autre, le flamenco et la musique des griots d’Afrique de l’Ouest. Quels éléments musicaux permettent aux musiciens de tendre des ponts entre ces deux traditions ?

L’instrumentarium est l’un des premiers éléments communs. Par instrumentarium je me réfère à la guitare, la kora et le oud. Ce sont là trois instruments à cordes pincées, mais chacun a son individualité. Néanmoins, ils peuvent offrir à l’auditeur des sonorités proches, très similaires, selon la manière dont ils sont joués. De fait, dans certains contextes on peut assez facilement confondre l’un avec l’autre. Sankoum, par exemple, arrive très habilement à produire des timbres sur son instrument qui se mélangent très bien avec la guitare, au point que parfois, quand le public africain entend la musique, il croit entendre une guitare et non pas une kora.

Ce dialogue entre la guitare et la kora est de plus en plus exploré de nos jours. Cela m’arrive, d’ailleurs, de ne pas pouvoir identifier avec clarté de quel instrument il s’agit, lorsque j’entends des enregistrements de guitaristes jouant de répertoires pour kora, et vice-versa. Si l’on ferme les yeux, parfois ce n’est pas facile. 

Le nomadisme serait un deuxième élément intégrateur des langages musicaux que notre ensemble explore. Les Mandingues (Afrique de l’Ouest) sont des nomades ; les gitans le sont aussi, à la base. Même si en Espagne ces derniers se sont plutôt sédentarisés, pendant longtemps ils n’ont cessé de se déplacer, favorisant les échanges culturels en se nourrissant des savoirs et de pratiques des autres.

 

Ethnomag : Et quels éléments distinctifs de chaque langage musical restent présents dans votre proposition artistique ?

L’aspect rythmique est l’un des plus importants ! Le flamenco, par exemple, fonctionne avec des métriques de douze temps, structurées en deux parties : une première, rassemblant deux groupes de trois temps, et une deuxième partie, rassemblant trois groupes de deux temps. Les codes de regroupement rythmique de la musique africaine sont très différents. De loin, je ne les ai pas tous intégrés. Toutefois, nous veillons à ce que ces deux composants rythmiques, ces métriques, ressortent dans notre proposition musicale, même si ce n’est pas évident de les articuler au sein d’une même architecture musicale. Je pense, toutefois, que cette interaction de langages fait partie de notre signature. En outre, les différentes couleurs produites par la percussion évoquent une grande variété de paysages ! Cela nourrit énormément notre proposition musicale.

 

 

ENSEIGNEMENT AUX ADEM

 

Ethnomag : Vous êtes un artiste polyvalent, qui avez dédié une bonne partie de votre carrière musicale au flamenco. Quelle place occupe l’enseignement de ce style dans votre parcours artistique et aux ADEM en particulier ?

C’est vrai que le flamenco occupe une place importante dans ma vie, même si j’ai commencé assez tard ! J’avais 26 ou 27 ans et je jouais déjà de la guitare. J’ai appris la guitare flamenca en accompagnant deux ou trois fois par semaine des cours de danse.
De nos jours, l’enseignement de la musique flamenca occupe une assez grande place dans ma vie. D’autant plus que mon investissement en tant qu’enseignant et accompagnateur de flamenco a évolué au fil du temps au sein des ADEM. Pendant un moment, j’ai eu des élèves de guitare au sein d’un groupe. Ensuite, j’ai décidé de me concentrer sur des cours de guitare privés, dans lesquels l’enseignement est adapté aux besoins de l’élève. Ensuite, je les ai réunis pour réaliser un travail collectif. Actuellement j’accompagne les cours de Maud Brulhart et d’Ana la China, professeures de danse flamenca aux ADEM. 

 

Ethnomag : La danse occupe une place très importante au sein du flamenco. Comment s’articule-t-elle avec votre carrière et avec votre vie ?

Certes, la danse est très importante dans le flamenco et dans ma vie ! Dans le flamenco, la danse et la musique vont toujours ensemble, c’est pourquoi la communication entre danseurs et musiciens s’avère vitale. Cela témoigne de l’importance de pratiquer la musique en compagnie de danseurs, et de danser le flamenco accompagné par des musiciens jouant en live.  

L’un des ensembles qui m’a beaucoup apporté à propos de cette interaction entre musiciens et danseurs a été La cueva flamenca, ensemble par ailleurs invité à maintes reprises par les ADEM. Bien que l’ensemble ne soit pas très actif en ce moment, il a été très formateur pour tous ceux et celles qui en ont fait partie, en leur permettant de nourrir un lien très étroit avec la danse flamenca.

 

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Pour plus d’informations sur les cours de Daniel Renzi autour de la musique et de la danse flamenca, cliquez ici  

 

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EN REGARD 

 

LES JARDINS DES ADEM 

Dans le cadre de l'émission Zanzibar, sur Espace 2, RTS.  Pour écouter la programmation de la première édition des Jardins des ADEM, cliquez ici ! 

 

COURS & ATELIERS 

Pour obtenir plus d’informations sur les cours de danse flamenca pour enfants et adolescents proposés par Maud Brulhart, cliquez ici  

Pour obtenir plus d’informations sur les cours de danse flamenca pour adultes proposés par Ana la China, cliquez ici ! 

 

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